La reconnaissance des bienfaits d’Allah, le Tout-Puissant, occupe une place fondamentale dans la foi musulmane, car elle rappelle au croyant que tous les bienfaits qu’il reçoit proviennent du Tout-Puissant. Elle (la reconnaissance envers Allah, le Tout-Puissant) est un état d’esprit et un mode de vie consistant à reconnaître, apprécier et utiliser les bienfaits qu’Allah a accordé à chaque créature conformément à Sa volonté.
Les références islamiques enseignent entre autres que la gratitude est une source d’accroissement et de préservation des faveurs divines reçues, et qu’Allah, le Tout-Puissant, aime ceux qui reconnaissent Ses bienfaits.
Allah, le Tout-Puissant, rappelant Ses bienfaits envers les hommes dit dans le coran : « Et Il vous a accordé de tout ce que vous Lui avez demandé. Et si vous comptez les bienfaits d’Allah, vous ne pourrez pas les compter. Certes, l’homme est vraiment très injuste et très ingrat » (sourate Ibrahim, v. 34).
Ce verset corrobore parfaitement avec ces propos du Prophète Mouhammad, paix et salut d’Allah sur lui, qui dit : « Celui qui se réveille en sécurité dans son foyer, en bonne santé dans son corps, et dispose de sa subsistance pour la journée, c’est comme si le monde entier lui avait été accordé » (rapporté par Al-Bukhari dans Al-Adab Al-Mufrad et par At-Tirmidhi dans As-Sunan).
Parmi Ses bienfaits innombrables, Allah, le Tout-Puissant, a une nouvelle fois accordé au Sénégal la grâce d’une alternance politique pacifique en 2024, mettant fin à une période d’incertitude, de tensions, d’insécurité et d’instabilité.
Cet événement, au-delà de sa portée institutionnelle, peut être interprété comme un immense bienfait d’Allah. À l’époque, un journaliste / chroniqueur remarquait que la sérénité retrouvée est telle que même ceux qui ont perdu le pouvoir se sentent plus en sécurité comparé avec l’atmosphère qui règne. Ce bienfait, qui s’ajoute à la sécurité des foyers, à la santé des corps et à la disponibilité d’une subsistance, illustre clairement la miséricorde d’Allah.
Face à de tels bienfaits, l’attitude du croyant doit être dictée par le Coran et la Sunna. Allah dit : « Et rappelez-vous lorsque votre Seigneur a proclamé : « Si vous êtes reconnaissants, très certainement J’augmenterai [Mes bienfaits] pour vous. Mais si vous êtes ingrats, Mon châtiment sera terrible » » (sourate Ibrahim, v. 7).
La gratitude ne se limite pas toutefois à un simple mot. C’est un état d’être qui engage aussi le cœur (reconnaissance que tout bienfait vient d’Allah), la langue (glorification et remerciement d’Allah par le verbe) et les organes (utilisation des bienfaits dans l’obéissance à Allah).
Le Coran nous offre des modèles parfaits de gratitude :
Le Prophète Nouh, paix et salut d’Allah sur lui, fut qualifié par Allah Lui-même de « serviteur reconnaissant » (sourate Al-Isra, v. 3). En effet, malgré des siècles d’efforts et d’opposition, sa gratitude envers son Seigneur ne s’est jamais démentie.
Les prophètes Daoud et Soulaymane, paix et salut d’Allah sur eux, sont aussi cités en exemple pour tout croyant lorsqu’ils dirent en guise de gratitude absolue envers Allah : « Louange à Allah qui nous a favorisés par rapport à beaucoup de Ses serviteurs croyants » (sourate An-Naml, v. 15). Une autre dimension de cette gratitude s’est aussi manifestée lorsqu’ils ont utilisé leurs pouvoirs extraordinaires (donnés par Allah) pour établir la justice et la vérité.
Lorsque le trône de la reine Balqis fut miraculeusement apporté en un clin d’œil devant le prophète Soulaymane, paix et salut d’Allah sur lui, il s’écria : « … C’est là de la grâce de mon Seigneur, pour m’éprouver si je suis reconnaissant ou si je suis ingrat. Et quiconque est reconnaissant, n’est reconnaissant que pour son propre bien ; et quiconque est ingrat… alors mon Seigneur Se suffit à Lui-même et Il est Généreux » (sourate An-Naml, v. 40). Il vit ainsi dans ce miracle une épreuve quant à sa gratitude.
Face à la crise actuelle, nous pointons souvent la responsabilité des dirigeants. Mais qu’en est-il de la responsabilité collective et de chaque citoyen ?
L’ingratitude est certes un manque de reconnaissance envers Allah, mais c’est aussi une cause directe de perte des bienfaits. Cette situation nous interpelle tous, d’une manière ou d’une autre et pousse à certains questionnements : quel a été notre comportement collectif face à ce bienfait ? Avons-nous suffisamment remercié Allah, le Tout-Puissant, ou avons-nous sombré dans la plainte et dans l’ingratitude ?
L’ingratitude envers Allah, le Tout-Puissant, est si grave qu’elle est souvent qualifiée de « mécréance du bienfait » dans le Coran. L’être humain est naturellement oublieux et ingrat, comme le souligne le Coran : « Et ton Seigneur a certainement été pour les hommes plein de bonté, mais la plupart d’entre eux ne sont pas reconnaissants » (sourate An-Naml, v. 73).
Plusieurs exemples illustrant des conséquences de l’ingratitude collective sont illustrés dans le coran.
L’exemple du peuple de Saba qui vivait dans l’opulence et la sécurité est assez illustratif. Allah, le Tout-Puissant, nous la décrit en ces termes : « Mais ils se détournèrent. Nous leur envoyâmes alors l’inondation du Barrage… » (sourate Saba, v. 16). Leur prospérité fut ainsi anéantie pour avoir renié les bienfaits d’Allah, le Tout-Puissant.
Le Coran nous raconte également la parabole de la ville qui était tranquille et en sécurité en ces termes : « Et Allah a proposé en parabole une ville qui était en sécurité et tranquille : sa part de nourriture lui venait de partout en abondance. Puis elle se montra ingrate aux bienfaits d’Allah. Allah lui fit alors goûter la violence de la faim et de la peur [en punition] de ce qu’ils faisaient » (sourate An-Nahl, v. 112).
Dans les épreuves comme dans les délivrances, il est dès lors aisé de pointer uniquement la responsabilité des dirigeants. Cependant, l’enseignement islamique souligne fortement la responsabilité collective. Si chaque citoyen, dans son domaine (fonctionnaire, commerçant, enseignant, étudiant), transgresse les règles de la justice, de l’honnêteté et du bien commun, c’est l’ensemble de la nation qui sombrera.
On peut ainsi se demander si l’ingratitude manifestée par une partie des sénégalais face aux bienfaits dont ils jouissaient de la part d’Allah, le Tout-Puissant, n’entraîne pas une conséquence divine qui aurait fait que le dirigeant élu s’écarte, volontairement ou pas, de ses promesses électorales. Face à ce triste constat, une réflexion profonde est soulevée sur la relation entre la gratitude collective et la stabilité politique. En effet, lorsque des populations bénéficient de la paix, de la sécurité et de ressources suffisantes, mais négligent de reconnaître ces bienfaits et de les préserver par des comportements responsables, cela peut ouvrir la voie à des épreuves. Dans ce contexte, il est possible d’interpréter le non-respect des engagements électoraux par le dirigeant comme une forme de mise à l’épreuve, un rappel que la prospérité, la tranquillité ou encore la stabilité ne sont pas garanties sans une attitude de reconnaissance des bienfaits d’Allah, le Tout-Puissant, et de vigilance citoyenne. Ce phénomène illustre le principe coranique selon lequel l’ingratitude peut entraîner la perte des faveurs d’Allah et l’apparition de difficultés, qu’elles soient économiques, sociales ou politiques.
Face à la situation sociopolitique actuelle, nous, sénégalais, sommes appelés notamment à :
· Mieux apprécier ce qu’Allah, le Tout-Puissant, nous a octroyé aujourd’hui en reconnaissant à sa juste valeur la situation de paix et de stabilité actuelles.
· Adhérer à la stratégie commune adoptée par la nation, cesser les complaintes stériles et se projeter ensemble vers un avenir fondé sur le travail, la justice et l’entraide. Cela implique une planification sérieuse et collective pour le développement du pays.
· Préserver ce joyau du Sénégal qu’est notre cohésion sociale, notre plus grande force
· Éviter de donner une porte d’entrée à l’ennemi et à ses manigances. Les divisions, les rumeurs, les accusations infondées et les haines tribales ou politiques sont en réalité des portes que nous ouvrons nous-mêmes à Satan, l’ennemi déclaré de tout être humain.
· Respecter la recommandation d’ordonner le bien et d’interdire le mal pour la survie de notre communauté, à la lumière de ce hadith : « l’exemple de celui qui ordonne le bien et de celui qui commet le mal est à l’image d’un groupe de gens sur un bateau en train de fendre les flots, chacun a une place précise. Soudain, l’un d’eux commence à percer un trou à la place où il se trouve, prétextant que cette place lui est particulière et qu’il peut en faire ce qu’il veut. Si les autres le laissent faire, ils périront et de périront tous et s’ils interviennent pour l’empêcher tout le monde qui se trouve sur le bateau sera sauvé y compris le pauvre malheureux » (rapporté par Boukhari).
· Multiplier les actes de gratitude, prier, faire acte de solidarité et de respect mutuel.
· Invoquer constamment Allah le Très haut pour qu’Il Nous accorde cette gratitude. Le prophète Mouhammad, paix et salut d’Allah sur lui, avait l’habitude de dire souvent « Ô Allah, aide-moi à T’évoquer, à Te remercier et à T’adorer de la meilleure manière ».
Le Sénégal se trouve à une croisée des chemins et s’est vu accorder de la part d’Allah, le Tout-Puissant, une délivrance qui est à la fois un bienfait et une épreuve. Il est de notre devoir d’être du nombre des serviteurs reconnaissants comme Nouh, Daoud et Soulaymane, paix et salut d’Allah sur eux, en œuvrant pour préserver et accroître ce bienfait par notre piété collective et notre travail.
Au demeurant, il importe à tous de considérer que le destin de notre nation n’est pas seulement entre les mains de ses dirigeants, mais entre les nôtres, collectivement et individuellement. Œuvrons donc, avec gratitude et responsabilité, pour un Sénégal meilleur propice à l’adoration de notre Seigneur.
Rappelons-nous que « toute âme est l’otage de ce qu’elle a acquis » (sourate At-Tur, v. 21).
Ô Allah, aide-nous à T’évoquer, à Te remercier et à T’adorer de la meilleure manière. Ô Allah, fais de nous des serviteurs reconnaissants pour Tes bienfaits, et protège-nous contre l’ingratitude et la négligence.
Par Dr GUEYE Mouhammad Al Amine
Chercheur, socioéconomiste – planificateur


